« Famille Chrétienne», « Rendez-vous » par Luc Adrian
Sœur fou rire.
C’est l’histoire d’une Belge qui a une sacrée frite – et pas qu’une fois, tu vois. Cette accroche est trop facile, mais on y cède tant elle a l’approche facile, Sœur Marie de la Visitation. Si facile qu’on a envie de lâcher cette ancienne journaliste de la télé belge, âgée de 43 ans, vêtue de la coule blanche et marron glacé des consacrées de la Communauté des Béatitudes, sur les lignes du métro parisien avec une caméra cachée. Cela donnerait un feuilleton apostolique, sorte de « K(T)Oh lanta » de la jungle urbaine.
Tenez, rien qu’à l’abribus « Évangile », ligne 60, Paris XVIIIe, près des bureaux de FC, cette « Sister Act blanche » (comme l’a surnommée l’un de ses amis) aborde un immense Malien, très digne dans sa gandourah bleu pétrole, et lui lance, espiègle, avec un sourire à retourner un sataniste dépressif : « Chacun sa robe, n’est-ce pas ? » Trois minutes de papotage plus tard, Sœur Marie promet à ce musulman, père de huit enfants, ravi : « Je prierai pour vous ».
« J’aime offrir des sourires », confie « Madame de la Visitation » – comme certains confrères du CNPC (Centre national de la presse catholique) l’appellent, embarrassés par son habit religieux qui est, paradoxalement, son meilleur appeau. Sœur Marie a l’info dans la peau mais ne décrypte plus les nouvelles avec le regard du monde. Dédaignant une actu alitée tant elle est fiévreuse, la rédactrice en chef – depuis sept ans – du mensuel d’évangélisation Feu et Lumière se consacre à la presse « (God) people ». Sa passion : déchiffrer les « clins Dieu » dans les rencontres inopinées qui jalonnent ses journées. Elle vient d’en narrer une quarantaine dans un livre « écrit d’un jet : celui du cœur », au style très radiophonique.[…]
Belge et frite : trop facile, on est d’accord. Pourtant, quelle image intérieure recevra la future consacrée lorsqu’elle devra choisir sa communauté ? Une bassine d’huile sur la flamme. « L’ébullition de la contemplation déborde pour moi dans l’action », résume la contempl’active dont le bouillonnement est nourri chaque matin par une heure de lectio divina. Là se cache le secret de la vraie frite, une foi.